30 août 2009

La diagonale du mou

Joueuse de Caroline Bottaro.

Le film préféré de Nicéphore Niepce : une succession de clichés. En Corse (pour les paysages) une femme de chambre continentale se prend invraisemblablement de passion pour le jeu d'échecs dans l'espoir de pimenter sa morne vie.

De bons acteurs, aux rangs desquels Sandrine Bonnaire et Kevin Kline sont allés se fourvoyer dans cette soporifique production : dialogues éculés, musique lourdingue, situations téléphonées, personnages creux comme des arbres morts. Aucune substance dans cette poussive adaptation d'un roman qu'on ne souhaite pour rien au monde lire, mise en images avec une maestria que n'envierait pas même un téléfilm français.

L'un des aspects les plus rébarbatifs réside dans le fait que Kevin Kline, visiblement un peu juste en français, débite ses dialogues à deux à l'heure avec un accent américain à couper au couteau, mettant dix plombes pour venir à bout de la moindre phrase. Si c'est un film sur l'incommunicabilité, ça confine au génie.

Et pourtant quand Sandrine Bonnaire joue la finale d'un tournoi d'échecs, on est pas loin de sentir la puissance contenue dans le jeu, la façon dont les joueurs se projettent sur l'échiquier et comment cet échange apparemment très policé cache en fait une lutte à mort. On apprécie alors d'autant mieux à quel point la réalisatrice est passée à côté de son sujet.

Crash-test :

28 août 2009

Aaaahihahiaaaahihahiooooh !

Tarzan, ou Rousseau chez les Waziri au musée Jacques-Chirac à Paris jusqu'au 27 septembre.

Dans une mise en abyme assez confondante de la part d'un musée assez décrié pour sa vision eurocentrique de l'art extra-européen, cette exposition Tarzan met en perspective de façon somme toute originale et à coup sûr très plaisante une mythologie d'inspiration coloniale mais pas seulement où Afrique= jungle=sauvages.

Edgar Rice-Burroughs et le Tarzan cinématographique de 1918.

Le premier roman d'Edgar Rice-Burroughs datant de 1912 s'inscrit ainsi dans la continuité du mythe de l'enfant sauvage élevé par des bêtes, que l'expo remonte dans le temps chercher jusque chez Remus et Romulus, et à la suite de nombreux récits fascinés par le mystérieux continent vierge succombant peu à peu aux explorateurs qui ont fait la légende du XIXème siècle, dont entre autres les Voyages très extraordinaires de Saturnin Farandoul de mon copain Albert Robida.

Tarzan par Burne Hogarth.

Tarzan par Johnny Weissmuller.

Au gré de nombreuses sources du mythe mais aussi des différentes déclinaisons de Tarzan, qui connut un succès immédiat dès sa parution, on parcourt l'exposition en découvrant tableaux, objets anciens, éditions originales, planches de BD originales, affiches de film, extraits de films, et jusqu'à des objets publicitaires beaucoup plus récents. On retrouve ainsi l'homme-singe au centre d'un foisonnement de références, création imaginaire d'une société totalement bouleversée par un siècle d'industrialisation au grand galop, travaillée par les notions de progrès, de civilisation, et se complaisant en ce fantasme rousseauiste d'homme originel, faisant corps avec une nature intacte, dégoulinant de sexualité brute, et bien sûr blanc.


L'infinie variété des exploitations commerciales du mythe finit par être délicieusement savoureuse, la palme de cocotier revenant sans aucune contestation possible au Greystoke avec Christophe Lambert. Mais si souvenez-vous, enfin, Christophe Lambert ! Quoi ? Personne ne se rappelle ? Eh bien tant mieux.

26 août 2009

Les bourreaux meurent aussi,
mais plus tard

The Reader de Stephen Daldry.

Devoir de philo sur la culpabilité. Dans un bled d'Allemagne de l'Ouest à la fin des années 50, un adolescent découvre la passion amoureuse dans les bras d'une receveuse de tramway, laquelle disparaît du jour au lendemain sitôt qu'on lui offre un emploi administratif en guise de promotion. Devenu étudiant en droit, le jeune homme revoit cette femme quelques années après sur le banc des accusées d'un procès pour crimes de guerre. L'ancienne gardienne de camp préfère alors prendre perpette plutôt que d'avouer son illettrisme.

Je suis très perplexe devant ce que le film essaie de nous raconter. Est-ce un commentaire sur l'amoralité de l'horreur nazie (ce dont on se doutait un peu) que de nous montrer un bourreau qui considère qu'il est infiniment plus grave de ne pas savoir lire que de laisser brûler vives trois-cents personnes dans une église ? Mais alors pourquoi nous rendre ce personnage si humain, et au fond, plutôt sympathique ? Parce que le les crimes nazis étaient œuvre humaine et que de biens braves gens y ont prêté la main ? Franchement, on s'y perd, et je ne vois pas bien quoi retirer de ce gloubiboulga pour sujet de bac.

Avec ça le film, qui a tout de même de bons interprètes, souffre de quelques défauts d'invraisemblance, à commencer par les Allemands qui s'expriment tous dans un magnifique anglais, bon, admettons qu'il faille en passer par là, la Liste de Schindler a bien fait pareil, mais pendant ce temps-là, les silhouettes s'invectivent en teuton en arrière-plan. Et c'est tout de même un comble que de devoir entendre Bruno Ganz déclamer en anglais dans un film qui se passe entièrement en Allemagne ! Et puis deux acteurs sans aucune ressemblance physique jouent le même personnage masculin dans des scènes situées à très peu d'années d'intervalle. Mais bien sûr ! A l'heure où tout Hollywood se paie d'effets spéciaux, ça aurait peut-être été le moment de mettre le paquet sur les maquillages et d'avoir un seul acteur, ça aurait eu l'air moins cucul.

Crash-test :

25 août 2009

Versailles rive moche

Bancs publics de Bruno Podalydès.

Comédie pas drôle. Sous-titré en fait Versailles, rive droite, il s'agit là du dernier volet d'une trilogie versaillaise de l'aîné des Podalydès. Une mystérieuse banderole portant l'inscription "homme seul" est aperçue à la fenêtre d'un appartement. Intriguée, une foule de personnages s'agite en contrebas, aux prises avec ses tracas quotidiens, seulement reliée par une mince proximité géographique avec la banderole. La clé de l'énigme de l'homme seul nous sera finalement livrée sans qu'on en soit plus malin pour autant.

Bruno Podalydés est visiblement capable du meilleur comme du pire, et là, avec cet hybride particulièrement raté dans le genre je voudrais bien faire du Tati mais ça finit en Max Pécas, on est plutôt dans la deuxième catégorie. Le malheur est que les gags ne sont pas drôles, les acteurs (la fine fleur du cinéma français, je vous fais grâce de la liste, défile devant la caméra) ont l'air de se demander ce qu'ils font là, et que le réalisateur acteur lui-même envahit l'écran avec un à-propos qu'on aura du mal à percevoir.

J'espère notamment pour Catherine Deneuve qu'elle a d'autres projets en cours, parce que si sa prestation dans ce film doit être le dernier souvenir qu'on garde d'elle, pauvre cinéma français !

Crash-test :

24 août 2009

Taupe modèle

La petite taupe de Zdeněk Miler.

J'ai fait fortuitement cet été, sans même me fendre du moindre coup de bêche dans le jardin, la plus exquise des rencontres en la personne de Krtek, plus connue en France, les tchécophones auront traduit ma plume, sous le nom de Petite taupe.

J'ai aussitôt commandé un magnifique coffret de DVDs, livrés dans leur amusante petite valise qui sert également à transporter des legos et/ou des poupées démembrées. C'est édité par Arte Vidéo, grâces leurs en soient rendues, et on y retrouve vingt-sept des cinquante films que compta la série, créés entre 1957 et 2002 sous la houlette Zdeněk Miler, génie méconnu de l'animation mondiale.


Le studio praguois qui l'employait avait demandé à Miler de créer un personnage mignon comme tout pour les mômes, et comme la petite souris était déjà prise, il arriva bien vite à ce personnage original de la petite taupe, qui fait les quatre-cents coups avec ses amis de la forêt, jusqu'à ce que la ville finisse un jour par les rattraper. Tchécoslovaque puis tchèque, sous régime communiste puis capitaliste, au gré des aléas géopolitiques, la petite taupe a traversé les âges en paraissant rester imperméable au brouhaha d'un demi-siècle, et en s'affirmant surtout écolo avant l'heure.


L'animation elle-même n'est peut-être pas des plus élaborées, mais les historiettes, de cinq à dix minutes chacune, sont à la fois pleine de poésie et intelligentes, ce qui n'est pas si courant dans des dessins animés pour tout petits (jusqu'à 43 ans). Les décors par contre y sont d'une exubérante richesse de détails et de couleurs. Et enfin, ces films sans dialogues, qui s'exportent ainsi sans peine, ont bénéficié d'une musique originale et d'une bande son particulièrement soignées.



Bref, Petit ours brun peut aller se rhabiller, et je connais une bibounette qui est privée de Massacre à la tronçonneuse jusqu'à nouvel ordre.

22 août 2009

Las Vegas Parano

Very bad trip de Todd Phillips.

Comédie culte. Deux jours avant son mariage à Los Angeles, un jeune homme part enterrer sa vie de garçon à Las Vegas avec ses deux meilleurs amis et son beau-frère. Le lendemain matin le trio d'accompagnateurs se réveille dans la chambre d'hôtel ruinée, un bébé dans le placard, un tigre dans la salle de bain, sans aucun souvenir de la nuit passée, et le marié a disparu.

Alors certes, des films qui partent un peu comme ça, on en a déjà vus, et pas toujours des bons, mais là, miracle cinématographique, tout marche comme sur des roulettes et même avec une certaine grâce : si tout est un peu extrême dans cette histoire, le grotesque des situations est contrebalancé par des dialogues au cordeau, dialogues qui contribuent à dessiner parfaitement des personnages tous un peu fêlés (au propre ou au figuré puisque l'un se retrouve vite berchu), personnages merveilleusement portés par des acteurs tous inconnus qui s'en donnent à cœur joie. Si une seule tête d'affiche hollywoodienne avait pointé le bout de son nez, ça aurait peut-être suffi à gâcher cette mayonnaise. Enfin, y a quand même Mike Tyson, qui joue tellement son propre rôle qu'il donne un sacré gnon.

On pourrait encore louer la mise en scène à la fois efficace et somme toute assez retenue, mais le coup de génie de ce film franchement hilarant réside dans sa construction, puisque les personnages pas plus que les spectateurs ne connaissent leur histoire, et ce sont les premiers qui vont refaire le scénario à rebours pendant une heure et demie pour en recoller les morceaux. Tout finit heureusement par le mariage, écueil célèbre des comédies étasuniennes, là encore désopilant, et une chute habile et outrancière qui ne nous révèle jamais la totalité de l'affaire.

Pour terminer vouons une fois encore les crétinissimes distributeurs français aux gémonies pour avoir affligé ce film brillant d'un titre inepte, supposé nous faire penser au Very Bad Things à l'argument très vaguement similaire (notez d'ailleurs que je n'ai pas mis les majuscules réglementaires pour les titres anglais en tête de ce billet tellement Very bad trip est du franglais imbécile). Ce présent film qui s'appelle en anglais The Hangover, aurait dû s'appeler La gueule de bois, ou au moins La cuite en français. C'est tout de même pas bien compliqué, si ?

Crash-test :

21 août 2009

What The...

Je peux tout expliquer. Ça n'est pas du tout ce que vous croyez. Je n'ai pas renoncé à animer cette gazette gothique, simplement, pris par un gros gros dossier, s'ajoutant à diverses péripéties vacancières, j'ai soudain trouvé moins de temps à consacrer à la rédaction des libelles enflammés qui ont fait la réputation tout à fait usurpée de l'endroit. Je conçois bien la lipothymique détresse de certains lecteurs, soudain sevrés de leur dose épisodique de fadaises, errant comme des âmes en peine sur la toile à la recherche d'idioties de même calibre mais en vain.

Et ce gros gros dossier, les plus perspicaces d'entre vous l'auront détecté ici dans les liens tout en bas de la colonne de droite, il s'agit de What The Movie, un site qui, comme son nom l'indique presque, est un quiz cinématographique, qui s'est même doublé lors d'une récente refonte d'une sorte de réseau social permettant aux cinéphiles en phase terminale d'interagir entre eux. Cette saloperie, créée voilà un an environ par deux étudiants allemands, est éminemment contagieuse, et m'a happé aussi sûrement qu'un ghostbuster aspire un ectoplasme.


L'originalité du site, outre qu'il est entièrement gratuit, et qu'il n'y a rien à gagner, tient au fait que les images proposées à la sagacité des usagers sont envoyées par les utilisateurs eux-mêmes depuis leur vidéothèque personnelle. Avec toutes les daubes que je m'enfile au cinéma à longueur d'année, j'arrive tout mouillé de chaud à en reconnaître un gros tiers. Si vous faites mieux, faites moi signe.


Bon allez, j'éteins mon ordinateur et je reprends une activité normale. A moins que je ne fasse encore un dernier petit tour sur WTM...

20 août 2009

L'amour en fuite

Partir de Catherine Corsini.

Constat d'adultère. Une femme quitte son mari pour un autre type. Voilà. Voilà voilà voilà. C'est à peu près tout.

Je pourrais bien sûr faire l'effort de fournir un peu davantage de détails, le riche et odieux mari médecin, la mère de famille au foyer qui veut reprendre son boulot de kiné, l'amant pauvre ouvier catalan, les gamins désorientés appelés à choisir leur camp, ça ne rendrait pas tellement plus passionnante une intrigue d'une désolante banalité.

C'est pourtant pas trop mal filmé, plutôt bien interprété par l'excellent trio Kristin Scott-Thomas, Yvan Attal, Sergi Lopez, mais ce vaudeville dramatique risque de laisser de marbre quiconque n'a pas encore eu la chance de divorcer, ou de connaître un rupture difficile dans les jolis décors de l'été nîmois, soit tout de même pas mal de gens au nombre desquels je dois bien me compter.

Crash-test :