26 août 2009

Les bourreaux meurent aussi,
mais plus tard

The Reader de Stephen Daldry.

Devoir de philo sur la culpabilité. Dans un bled d'Allemagne de l'Ouest à la fin des années 50, un adolescent découvre la passion amoureuse dans les bras d'une receveuse de tramway, laquelle disparaît du jour au lendemain sitôt qu'on lui offre un emploi administratif en guise de promotion. Devenu étudiant en droit, le jeune homme revoit cette femme quelques années après sur le banc des accusées d'un procès pour crimes de guerre. L'ancienne gardienne de camp préfère alors prendre perpette plutôt que d'avouer son illettrisme.

Je suis très perplexe devant ce que le film essaie de nous raconter. Est-ce un commentaire sur l'amoralité de l'horreur nazie (ce dont on se doutait un peu) que de nous montrer un bourreau qui considère qu'il est infiniment plus grave de ne pas savoir lire que de laisser brûler vives trois-cents personnes dans une église ? Mais alors pourquoi nous rendre ce personnage si humain, et au fond, plutôt sympathique ? Parce que le les crimes nazis étaient œuvre humaine et que de biens braves gens y ont prêté la main ? Franchement, on s'y perd, et je ne vois pas bien quoi retirer de ce gloubiboulga pour sujet de bac.

Avec ça le film, qui a tout de même de bons interprètes, souffre de quelques défauts d'invraisemblance, à commencer par les Allemands qui s'expriment tous dans un magnifique anglais, bon, admettons qu'il faille en passer par là, la Liste de Schindler a bien fait pareil, mais pendant ce temps-là, les silhouettes s'invectivent en teuton en arrière-plan. Et c'est tout de même un comble que de devoir entendre Bruno Ganz déclamer en anglais dans un film qui se passe entièrement en Allemagne ! Et puis deux acteurs sans aucune ressemblance physique jouent le même personnage masculin dans des scènes situées à très peu d'années d'intervalle. Mais bien sûr ! A l'heure où tout Hollywood se paie d'effets spéciaux, ça aurait peut-être été le moment de mettre le paquet sur les maquillages et d'avoir un seul acteur, ça aurait eu l'air moins cucul.

Crash-test :

5 commentaires:

l'inegalable vivie a dit…

Tu as fini par voir le film sans motivation extrême , semble t il .
je partage tes remarques du 2éme paragraphe. Mais je suis plus convaincue que toi de la portée" un peu dérangeante , mais non pas moins intéressante du propos.

Culpabilité évidemment.
Mais pas forcément celle que nous fait porter la morale occidentale commune, au sens où les nazis et autres comparses du même tonneaux n'en auraient pas.
Il me semble surtout qu'ils étaient convaincus d'une autre mission/devoir " moral(e)" que celle que définit notre "éthique "démocratique et humaniste", pour faire très vite.
Donc , il y a toujours une amoralité relative , d'autant plus évidente qu'on est persuadé d'être du coté des biens pensants..


c'est la même que celle qui pousse à se transformer en bombe humaine au milieu de la foule , ou à partir en croisade pour découdre de la religion d'en face , voire même de piller la richesse d'en face à au nom d' éthique nationaliste , économique , sociale , ou philosophique dont nous sommes si fiers..
c'est la même que celle qui pousse X ou Y à affirmer sa toute puissance pour jouir du pouvoir sur l'autre , le "bien suprême" .

Nazi en Allemagne , oui , mais combien d'autres idéologies redoutables ailleurs?
Nous sommes tous à des degrés divers de "petits nazis "potentiels. D'où la remarque du prof de droit ; " ce n'est pas la morale qui nous guide.." , mais notre survie et notre profit personnel en dehors sœur Emmanuelle/ Theresa(..) et quelques autres comparses peut être.
Ce qui ne nous empêche pas de ressentir une culpabilité toute personnelle , pour des perspectives qui échappent au commun .
Comme Hanna pour qui son analphabétisme est la pire des tares , celle qui l'a poussée à n'accepter que des travaux à "sa portée ", indifféremment gardienne de camp ou receveuse de tramway : Dans sa morale de survie personnelle, celle du travail " bien fait" pour masquer tout le reste , elle est fidèle à l'idéologie commune , le moule de son époque, et sa culpabilité ne s'y arrête pas plus que ça.
Même si cela semble terrible , je crois que nous fonctionnons parfois ainsi , en nous protégeant d'abord nous même , la morale dut elle en souffrir, le plus discrètement possible.

La vie intime , nos frustrations et nos propres noirceurs nous motivent plus qu' une soit disant morale commune, guidant tout aussi apparemment notre raison.

Voilà pourquoi le personnage d'Anna reste curieusement sympathique.
Ainsi , prise dans une idéologie commune , la culpabilité personnelle commise au nom de "l'idéologie du parti", au nom de la "morale commune" se dissout car on peut toujours reporter la responsabilité sur un comparse , sur le contexte social , l'opportunité..

si n'en était pas ainsi , ce serait le paradis sut terre , non?

Hobopok a dit…

Bref, Anna, c'est toi.

l'inegalable vivie a dit…

tu bottes en touche , là! :( .
Me répondre ça de manière "fermée", m'étonne de ta part. Apparemment , j'ai du manquer de pédagogie.
C'est facile de répondre de la sorte , mais finalement académique et politiquement très correct, et par ailleurs sans contradiction avec ce que je développe au dessus.
Pour ouvrir le débat , vu que je ne parle pas du tout de moi en particulier:
" Le culturalisme comme idéologie, comme discours académique, scolaire, politique ou journalistique rencontre cependant un succès aussi large que dangereux. Il enferme l'humanité dans des logiques d'exclusion, de peur et de violence dont le génocide est la forme paroxysmique."

" intégrer la diversité" in "Atlas de la mondialisation" 2009 comprendre l'espace contemporain. MF Duran,P COpinschi,B Martin, D Placidi.
Sciences po. les presses.

A lire , bien en dehors de ce point de détail pour les amateurs de géo.

Bon , je laisse la place à des commentateurs plus politiquement corrects et plus consensuels.

Glorb a dit…

Non, ils sont bien tes commentaires, ça lui cloue le bec un peu à l'hobopok !

Moi j'ai trouvé que oui changer d'acteur pour lui mais pas pour elle, bidon, surtout que le maquillage marche bien pour elle hein.

Sinon j'ai trouvé (dans mes souvenirs, parce que c'était y a 6 mois) j'ai trouvé ça assez bien, à part peut être la fin de la fin de la fin, qui était un peu too much pour moi. Je reprendrais l'inégalable Vivie sur l'aspect "travail bien fait" qui la concernait au-delà de l'absence de moralité qu'on pourrait lui reprocher. Je trouve que Kate Winslet rend crédible son personnage dans ses convictions et sa logique de penser.

Hobopok a dit…

Merci Glorb, j'en ai encore mal au bec.

Pour Vivie je précise que je voulais surtout dire que le film t'avait visiblement plus touchée que moi parce que tu avais sans doute reconnu dans les personnages des choses qui te parlaient plus directement qu'à moi. D'ailleurs ton analyse ne manque pas de pertinence, et m'a même fait entrevoir comme une deuxième couche sous la surface du film. Pour en revenir à Anna, tu as sans doute mieux interprété son interpellation du juge "Et vous qu'auriez-vous fait à ma place ?", dont surtout l'absence de réaction de la part d'un juge mis en place pour un procès à résonance éminemment politique me paraissait pour ma part hautement invraisemblable.