L'heure est venue de mettre un peu les pieds dans le plat. L'écran plat. A l'aube du XXIème siècle, la télévision grand écran 16:9 est devenu le nouvel horizon de la haute technologie de masse, un signe extérieur de richesse d'intérieur plus convaincant encore qu'une montre de prix, qu'on porterait volontiers à son poignet avant la cinquantaine ne serait l'encombrement bi-dimensionnel résiduel. Et si la platitude revendiquée de l'objet ne fait pas débat, la généralisation du format 16:9 a provoqué un beau foutoir dans la diffusion.
Passons sur certaines personnes âgées de ma connaissance qui regardent la coupe de France de football, diffusée sur France 3, toujours en 4:3, en zoomant au maximum de la capacité d'affichage de leur écran, préférant voir vingt-deux petits gros courir sans ballon (hors champ) plutôt que de perdre un seul pixel de leur fabuleuse dalle 16:9. Passons sur les chaînes elles-mêmes qui semblent n'avoir pas encore choisi très franchement entre les deux formats de diffusion, avec des grilles qui comptent encore des émissions en 4:3 et d'autres en 16:9, et jusqu'au sein d'une même émission, produite dans un format mais incluant des images tournées dans l'autre, c'est le palais des glaces à la foire du Trône, avec succession de petits râblés et de grands échalas, Patapoufs ou Filifers équitablement méconnaissables. Passons enfin sur les matériels vendus qui, profitant peut-être de la confusion des utilisateurs, semblent parfois incapables de reconnaître automatiquement un format d'image et s'obstinent à déformer, rogner, recadrer, décaler, des images devenues totalement hors de contrôle de leurs destinataires.
Deux grands minces qui lancent des ballons de rugby sur des allumettes.
Le plus grave, c'est qu'avec tout ça, j'ai failli me fâcher avec mon meilleur ami, un garçon pourtant sensé, doté d'un diplôme impressionnant sanctionnant de longues études dans le domaine des nouvelles technologies, et qui m'avait assis dans son canapé pour regarder The Big Lebowski des frères Cohen sur son grand écran 16:9. Comme je lui faisais remarquer que Jeff Bridges me paraissait nettement plus mince que dans mon souvenir, et lui demandais s'il était possible d'ajuster l'image au format prévu pour sa diffusion, il éleva franchement le ton, genre vu le prix qu'il a payé son bidule, le bidule doit bien savoir ce qu'il fait, et si ça te plaît pas, t'as qu'à gna gna gna... etc... Je l'ai bouclée, préférant conserver son irremplaçable amitié, et j'ai regardé John Goodman transformé en basketteur.
Il est très curieux d'observer comment ce qu'on nous présente comme un progrès technologique, le 16:9, et son corollaire, la diffusion en numérique, aboutit en pratique à une chute brutale de la qualité de l'image télévisuelle pour la plupart des gens. On accepte de regarder une image déformée sans sourciller, alors que si le son était distordu dans les mêmes proportions on grimperait aux rideaux.
*Lebowski le mince
12 mars 2009
The Slim Lebowski*
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8 commentaires:
Aahahahahaha. Merci pour cette légende de photo.
Enfin un canard qui pose les bonnes questions! Je n'en puis personnellement plus d'avoir à subir sur ma télé 4/3 des films qu'on me colle d'autorité plein écran en 16/9 et dont par conséquence je perds 2 larges tranches, une à droite, l'autre à gauche. Si Hobopok Dimanche lance le mouvement national de protestation contre les diffusions à la mords-moi-le-noeud, j'adhère!
PS: Je n'ose imaginer les frères Cohen découvrant un jour, dans leur propre film, John Turturo en train de lécher un ballon de rugby avant de tenter le drop (oups, le strike...)
Ah, il faut que je fasse ici l'éloge de mon téléviseur 16/9 Sony (classique) que j'ai réglé sur le fameux 4/3+ (ou l'équivalent, je confonds avec mon ancien Philipps). En effet, ce format découpe légèrement le 4/3 en zoomant dessus mais franchement, pour regarder les infos régionales, ça ne mange pas de pain. Il se met tout seul comme un grand en 16/9 quand il le faut et ne propose que rarement une image déformée. Seule vraie contrainte: vérifier lors du visionnage d'un vieux film (genre années 50) que l'on ne doit pas repasser en 4/3 classique de peur de couper quelque chose. Mais franchement, je suis très content d'avoir du 16/9. Rien que pour le foot sur la 1 (ah aha hah, j'appuie où ça fait mal).
Badjack est un peu de mauvaise foi (ou alors très jeune): le 4/3 de la télé de mon papa proposait non seulement une miniature (quand on pense à la taille des écrans de l'époque) mais coupait AUSSI les bords des films. Si c'est pour revenir à cette époque pas bénie, merci bien.
Par contre, je râlerai bien contre une chaîne comme France 4 dite de service public qui proposait "6 feet under" en version tronquée 4/3 (et ça se voyait un peu) (et évidemment sans VO alors que TF1 le propose pour ses séries. Un peu le monde à l'envers).
Et pour terminer, j'ai visionné il y a peu avec mon fiston the Big L et en de bonnes conditions. La prochaine fois tu viendras à la case, Hobopok :-)
(il faudrait aussi aborder le pb des sous-titrages qui débordent du format de visionnage du film. Assez galère).
Mon Dieu Li-An, tu es déjà contaminé par ce futurisme bancal d'ingénieur cantonnais : tu préfères tronquer les actualités régionales ? Méfie-toi, tu es peut-être déjà une personne âgée ! D'ailleurs j'entends la camionnette du plateau-repas qui klaxonne devant ta porte.
@Badjack, Sergio Leone en 4:3 : la brute.
Enfin, je suppose que je les tronque puisque je ne vérifie pas le format. Tu veux dire que ne pas voir les pieds des bottes du syndicaliste CGT ou le haut des toits de St Ménéhou mérite la mise en maison de retraite ?
Et comme ce doit être une des seules émissions 4/3 que je regarde régulièrement...(en fait, plutôt le journal France 3 de 23 h).
Vas-y, raccroche-toi aux branches.
Comme disait Tarzan :-)
Li-An, je ne suis pas très jeune, mais je suis incontestablement souvent de mauvaise foi! C'est vrai que c'était pas mieux avant, mais il me semble que j'ai perdu les côtés récemment dans certaines diffusions. Par exemple hier, les sous-titres en bas à droite et à gauche des 20 ans des guignols, j'en avais la moitié. Et ça, ça ne date (pour les guignols par exemple) que de quelques mois.
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