Boy A de John Crowley.
Graine de violence. En Angleterre contemporaine, un jeune adulte encore post-adolescent sort d'un long séjour en prison, sous surveillance d'un éducateur. Il est relocalisé dans une nouvelle ville, sous une nouvelle identité, avec un nouveau boulot, et démarre une nouvelle vie. Quel crime a donc commis ce jeune homme, au demeurant charmant, qui justifie un tel luxe de précautions ? Son passé de meurtrier juvénile va le rattraper inexorablement. Le titre un peu abscons de prime abord fait référence à la désignation juridique des criminels mineurs dont l'anonymat est protégé dans les procédures.
Le scénario est tiré d'un bouquin lui-même inspiré d'un fait-divers qui avait frappé l'Angleterre il y a quelques années : deux gamins d'une dizaine d'années à peine avaient tué sauvagement un petit de deux ans. Des années après, à la libération des jeunes meurtriers, la soif de vengeance de leurs voisins de leur quartier de Liverpool, excitée par les tabloïds, était encore intacte. Crowley développe ce fait-divers pour brasser pas mal de thèmes fondamentaux : la culpabilité, bien sûr, le pardon, le droit à l'oubli, la filiation, et en profite aussi pour égratigner la société médiatique. Tout au long du film, des flash-backs vont révéler peu à peu l'effrayant passé infantile du héros, éclairant d'une lumière de plus en plus crue et de plus en plus insoutenable son présent si chaotique.
Comme on le voit, le sujet n'est pas à mourir de rire, et pourtant le film parvient à traiter l'ensemble avec une quasi légèreté, une grâce infinie, servi par l'élégance blafarde d'une photo exceptionnelle. Le soin apporté aux cadres trahit une intelligence de l'image au-dessus de la moyenne : Crowley (et peut-être aussi un peu son dirphot') sait tirer le meilleur parti graphique de ses décors et de ses lumières pour construire des plans intelligents entièrement motivés par la narration. C'est bien le moins au cinéma, me dira-t-on, mais ce n'est finalement pas si courant que ça. On finit par être pris d'empathie pour le malheureux gamin, sans savoir au fond s'il faut davantage le blâmer ou le plaindre. Et le film ne tranche pas tout à fait non plus, n'impose pas de point de vue moral, ce qui vu le thème est assez fort.
Pour parfaire cette bonne petite claque dans la gueule, remarquons encore l'interprétation par une brochette d'acteurs britanniques inconnus par chez nous, tous épatants, à moins que ce ne soit encore une qualité à porter au crédit du réalisateur d'avoir su obtenir le meilleur de ses interprètes.
Le cinéma anglais ne nous sort pas souvent des perles, mais là, on a un sérieux candidat pour le Dummy® d'or 2010. On voit que les petites graines semées par le Ken Loach des débuts, avant qu'il ne devienne balourd, dogmatique et didactique, donnent des germes tout à fait prometteurs. Produit en 2007, Boy A a reçu pas mal de prix dans des festivals l'an dernier, notamment celui du film britannique de Dinard, mais ne sort que maintenant en France. Il était temps.
Crash-test :
6 mars 2009
Crime et châtiment
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2 commentaires:
Ha , encore un candidat pour mon carnet de bal.
j'aurai pas assez de temps pour tout voir en mars , (sauf à décevoir l'éducation nationale.)
le sujet effectivement interpelle. je suis assez ahurie de voir combien une partie de la jeunesse actuelle est fascinée et droguée au gore , à la violence , avec une apparente résistance de rhinocéros.
je suis étonnée de cette facilité avec laquelle quelques-uns, "au demeurant charmants" passent de l'imaginaireà à l'acte réel.
passion exaltée depuis Tarentino , jusque dans ces reculs les plus sombres? Ennui , absence d'idéal et ou d'espoir? pertes des valeurs à une époque où on bassine plus que jamais les gamins avec les droits de l"homme , le respect des différences etc..
Mais qu'est ce qui se passe dans la tête de ses gamins, qu'est ce qui les pousse à des gestes aussi ultimes?
on imagine que l'enfance n'a pas due être rose et madeleine.. donc oui , on ira voir.
Et j'imagine qu'une débutante comme toit doit avoir un carnet de bal bien rempli.
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