Pas d'actualité brûlante dans ce post, juste l'expression de mon admiration pour une grande illustratrice, Mary Blair (1911-1978). Je suis pas le premier, le net regorge de sites dédiés entièrement ou partiellement à son œuvre, mais c'est pas ça qui va me dégoûter de prendre le train en marche.
Née Robinson, elle était la belle-sœur de Preston Blair, animateur vedette chez Tex Avery, célèbre pour avoir animé le petit chaperon rouge sexy et autres vamps ondulantes.
J'ai rencontré la première fois Mary dans The Illusion of Life, la biblique et indispensable somme sur l'animation Disney. Un livre qui aide à mieux comprendre les tenants et aboutissants de l'animation classique, et qui révélait au fil des pages les noms de beaucoup d'artistes, dont Mary Blair, qui ont contribué dans l'ombre à la légende Disney. A une époque où dans les studios d'animation les filles étaient cantonnées aux tâches ouvrières de l'encrage ou du gouachage, Mary Blair tutoya les sommets en qualité de chef designer. Recherches de style, création de personnages, et tutti frutti. Autrement dit, elle faisait partie de ces artistes follement doués salariés par Disney pour avoir des idées qui se retrouvaient signées Disney dans les films Disney. Mary Blair était en fait le génie caché derrière des créations flamboyantes comme Cendrillon, Alice au pays des merveilles, ou Peter Pan.
Je l'ai croisée à nouveau sur les cimaises de l'exposition Il était une fois Walt Disney au Grand Palais en 2006. L'exposition, d'une grande richesse, était consacrée aux sources européennes des grands classiques Disney, et nombre d'originaux présentés, dont ceux, somptueux, que Mary Blair avait faits pour les préproductions de Peter Pan ou Alice, n'avaient jamais quitté les archives de la world company à Burbank, CA. Un sacré coup dans les mirettes.
Un livre tout entier, enfin, lui a été consacré, The Art and Flair of Mary Blair, qui donne à voir un panorama assez large de son talent, qui s'exprime dans ses travaux pour Disney, mais aussi des projets personnels tous azimuts, jusque dans la publicité. Le titre du livre a été repris par une grande rétrospective au San Francisco Cartoon Art Museum, dont les internautes disaient grand bien, mais qui a eu le mauvais goût de fermer en mars dernier, avant que j'aie le temps de m'organiser un petit week-end ad hoc avec mon jet privé (dans mes rêves).
A la lecture de ce livre, on saisit comment l'influence de Mary Blair a été décisive non seulement chez Disney, non seulement sur son époque des années 50 et 60, mais encore aujourd'hui chez nombre d'illustrateurs qui s'en revendiquent, quand ils ne préfèrent pas carrément la pomper sans vergogne.
Pour les lecteurs séduits mais fauchés, signalons le ravissant et enchanteur I Can Fly que Mary a illustré dans la collection à deux balles (mais super jolie) des Little Golden Books, éternels livres d'enfance actuellement réédités, et que les gamins pourront gribouiller et déchirer avec enthousiasme sans pour autant ruiner leurs parents.
Une première étape (en anglais) pour rebondir sur le web : Mary Blair chez l'excellent Cartoon Modern.
27 mai 2008
Queen Mary
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10 commentaires:
C'est typiquement le travail dont je ne vais pas parler sur mon blog. Si son talent est indéniable, son évolution vers une simplification gnan gnan aboutira à l'attraction "It's a small world", le cauchemard des parents des enfants en bas âge à Eurodisney. Avec elle et d'autres, les années 50/60 vont tourner le dos à une tradition classique de l'illustration et il faudra des décennies pour redécouvrir Rakham ou Pyle. Ces enfants avec de grosses bouilles, cette simplification à outrance, cette application des théories de l'Art de l'époque à l'illustration pour enfants a considérablement appauvri l'édition. Beurk, caca (je changerai peut être d'avis dans 5 ans, mais beurk caca pour le moment).
débat intéressant... je ne prendrai pas position , vu que mes connaissances en la matière sont bien limitées.
enfin , j'ai encore appris des choses.
Pas d'accord avec Li-An : on peut simplifier sans appauvrir (Savignac, Hergé ...). Pas facile d'être efficace avec un minimum de traits.
Dans son cas, la simplification était certainement une contrainte technique due au départ au travail d'animation, non ?
Ah, je n'ai jamais dit que "simplification"="appauvrissement". Dans son cas à elle, ce sont des choix purement esthétiques - Disney était fan de son travail- qui allaient à l'encontre de la culture des animateurs qui en bavaient pour rendre ces formes très plates intéressantes à animer.
Il y a eu appauvrissement parce qu'il était évidemment bien plus simple de travailler dans ce sens pour les illustrateurs, ce qui a induit un repli du dessin classique. Inutile de pinailler, ça correspond à une évolution de l'Histoire de l'Art mais en même temps une forme de perte de savoir faire... Un peu comme maréchal ferrant :-)
Qu'est-ce tu veux dire, Li-An, elle a couché pour arriver ?
Rakham ? Euh...
Encore heureux qu'il y a des Totoches qui ont gardé leur âme d'enfant (quoiqu'un peu simplifiée).
Je n'ose pas imaginer que Li-An envisage de nourrir graphiquement des moins de trois ans avec Pyle, Wyeth, Frazzeta, Darrow, que sais-je encore.
Pour ma part, j'aime bien la simplification, qui est fille de la simplicité. Less is more.
Je vois qui'il y en a qui n'apprécient pas la tarte aux mirabelles.
Moi je ne suis pas du tout, mais pas du tout d'accord avec Li-An, bien que je respecte son point de vue, tout le monde ne peux pas aimer ce genre de dessin je le concède... mais reconnaitre la virtuosité chez les autres, ça oui, on le peut.
Mary Blair est une de mes illustratrices préférée, et je le dit sans rougir, car elle a su lier la synthétisation des formes au service du sens de l'image pour en faire de petits chef d'oeuvres picturaux !
Son travail est riche de sens et d'ambiance, ses couleurs... merveilleuses !
Chaque image est pour moi un petit coup de coeur, car j'aime cette sobriété de moyen, la réserve dN'oublions pas que ce sont des dessins préparatoires pour la plupart, et ils remplissent grandement leur rôle.
Je suis sans voix face à son talent de coloriste et de dessinatrice, car son univers est réellement interprété... ses ambiances lumineuses si fortes, la simplicité apparente des formes (qui est plus en réalité une synthétisation) s'apparente au génie et demande au moins autant de travail qu'un dessin très poussé !...
D'ailleurs certains de ses dessins sur Cendrillon regorgent de détails (lustres, cristaux, mobiliers...)
C'est une grande femme, savoir ainsi aller à l'essentiel, avec des images très riches au final, très symboliques, j'appelle cela le talent !
Et je suis rarement si enthousiaste.
Après... on peut toujours regretter l'âge d'or du dessin, la perte du "savoir faire"... je ne pense pas que ça soit le cas avec Mary Blair cela dit, car elle a un réel savoir faire qui ferait rougir un tas de dessinateurs aujourd'hui (surtout pour l'économie de moyen en couleur).
J'adore le dessin " bien fait", les dessinateurs réalistes ont souvent ma préférence car très impressionnant de virtuosité, mais il s'agit ici d'un autre type de talent...
Certains sont de vrais génies... mais je pense que Mary Blair a ouvert autre chose, c'est un style résolument moderne qui mérite d'être salué pour ça aussi.
Et puis je crois que malgré tout, il y a de la place pour des style très différents aujourd'hui en édition, ce n'est pas du tout uniformisé, nous avons la liberté de choix quand à notre production de dessinateur et nos lectures sont variées.
C'est ça la liberté, chacun doit assumer ses choix.
Pour ceux que ça intéresse, on trouve le "I can fly" sur Amazon à 1,91 euros, frais de port compris.
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